L’une des premières choses que nous avons faites après avoir acheté la Grande Raisandière a été de commander une analyse aux spécialistes du sol, les Drs Bourguignon. Nos amis de la ferme en permaculture du Bec Hellouin en Normandie m’ont dit qu’ils auraient dû le faire dès le début, ce qui leur aurait épargné huit années de dur labeur dans les champs !
La principale conclusion de l’analyse de notre sol est que le champ de six hectares est en train de devenir acide.
En gros, le foin a été coupé deux ou trois fois par an, mais aucune fertilité n’a été mise en place – pas de compost, pas de fumier, rien. Il n’y a que deux endroits où le sol est bon : autour des deux grands chênes au milieu du terrain et près des haies autour du périmètre du champ. C’est parce que les feuilles, les brindilles et les branches qui tombent des arbres sont converties naturellement en un sol de qualité.
Les arbres fruitiers que nous avons déjà (grâce à Steve, l’ancien propriétaire) reçoivent tous le même traitement : une couverture de consoude (un accumulateur de nutriments qui pousse librement sur nos terres), du fumier de cheval bien mûri, et une couche de paille pour que l’herbe n’absorbe pas tous les nutriments.
Dr Emmanuel Bourguignon est le fils de Claude et Lydia Bourguignon, fondateurs en 1990 du Laboratoire Analyses Microbiologiques sols (Lams), un labo de conseil indépendant pour mettre en valeur « le sol de façon durable tout en préservant l’environnement ». Claude et Lydia sont sur le point de prendre leur retraite, Emmanuel reprend le flambeau. Il est venu nous rendre visite par une journée brillante mais froide de la fin novembre et nous avons passé trois heures à inspecter la terre ensemble.
Quelques mois plus tard, le rapport d’Emmanuel est arrivé. Une de ses conclusions était que nous avions besoin d’ajouter plus de biomasse à la terre en raison de l’acidité et des niveaux élevés d’argile, ce dont nous étions conscients depuis qu’en octobre dernier nous avions curé notre mare.
Nous avions alors dispersé la boue draguée de la mare autour du champ. Une excellente nouvelle pour la fertilité de notre terre, car la boue est de la matière organique (feuilles, branches, etc.) qui s’est décomposée sous l’eau. Emmanuel, qui est arrivé quelques mois après le nettoyage de l’étang, était déjà en mesure de voir à l’œuvre les vers faisant leur travail sur la boue excavée et les premières plantes brisant la boue.
Nous avons récemment emprunté un camion (à moteur diesel) pour récupérer le fumier du poney club local. Étant un peu novice, la première tentative d’Alexis pour déverser la charge à la Grande Raisandière l’a conduit à enterrer le hayon du camion sous trois tonnes de crottin ! Il a dû le dégager à la main – au grand amusement des charpentiers qui avaient prêté leur camion ! Et lors de son deuxième chargement au poney club, en janvier, il a embourbé le camion dans le champ très humide. Il a dû être tiré de là par notre voisin avec son tracteur (diesel) !!!
Plus récemment, nos amis Frédéric et Khalil se sont joints à nous pour un week-end de pelletage de fumier. Le premier jour, nous avions du mal à le trouver sous la neige ! Impossible par contre de perdre Khal dans son ensemble orange et rouge !
Progressivement, nous obtiendrons plus de biomasse sous forme d’orties, de chardons et autres soi-disant mauvaises herbes (plutôt des plantes au mauvais endroit !). On en trouve partout chez nous. Nul besoin de beaucoup d’incitation pour sortir la faux !
Nous fabriquons notre compost à partir de ces « mauvaises herbes », de fumier, de paille et de boutures d’herbe en utilisant la technique des « lasagnes » que j’ai apprise à la ferme en permaculture du Bec Hellouin.
Emmanuel nous a conseillé de mettre du carbonate de calcium sur notre terre, qu’on peut acheter sous forme de poudre. Mais les coquilles d’huîtres sont essentiellement faites de carbonate de calcium. Du coup, chaque fois que nous mettons la main sur des huîtres, leurs coquilles vont dans la terre (plutôt que dans la Seine, où nous les jetions auparavant !).
Et à chacun de nos voyages dans la région natale de Blanche, la Bretagne, nous rapportons un sac d’algues. Elles sont bonnes pour le sol, même si elles entraînent une réduction temporaire (15 semaines) de l’azote disponible pour les plantes, le temps que les bactéries les décomposent.
Un délai qui n’est pas bien grave puisque notre objectif est de planter des arbres fruitiers l’hiver prochain. D’ici là, nous espérons que notre traitement de fertilité naturelle aura fait la différence.
Cet article a été également publié sur Makery.fr, 13 mars 2018.